mercredi 13 septembre 2017

Messages de Christiane SINGER

Christiane SINGER :

"Je pressentais que chacun d'entre nous a, à son échelle, la charge du monde. Si je ne suis pas ordonnée, par mon désordre, j'entraîne le désordre autour de moi. Si, au contraire, j'entre dans l'ordonnance intérieure de l'amour, je rayonne. Et d'un seul être peut partir un tel rayonnement, qu'il répare une famille, un village ou une entreprise.... Des expériences comme ça, j'en vois tous les jours. Je n'invente rien. Il faut être un disciple de la Vie."(Ch. SINGER)

Dire: Aimer c'est délivrer l'autre de mes bonnes intentions - et de moi-même paraîtra excessifPourtant c'est en me détachant de toi et en m'ancrant en moi que je commence véritablement d'aimer.

L'amour n'est pas un sentiment. C'est la substance même de la création.

Lu dans PSYCHOLOGIES à propos de son dernier livre
Derniers Fragments d’un long voyage

Qu’avez-vous éprouvé en lisant le livre de Christiane Singer ?

Marie de Hennezel : Son livre m’a totalement bouleversée. Il y a, d’une part, ce récit tellement poignant et vrai de sa maladie ; et d’autre part, cette maîtrise magnifique de la langue, cette capacité à mettre des mots justes sur ce qu’elle vit. Sans vouloir ôter à son expérience ce qu’elle a d’unique, elle m’a confirmé ce que d’autres m’ont appris, du temps où j’accompagnais des personnes en fin de vie : le propre de l’humain est qu’il est habité d’une force spirituelle qui lui permet de surmonter les pires épreuves. Christiane Singer nous le jure : « Quand il n’y a plus rien, il n’y a plus que l’amour. »

On est frappés par l’intensité de ses souffrances…

C’est là que réside le caractère d’authenticité de ce témoignage : Christiane Singer ne faisait pas l’impasse sur l’enfer de la souffrance, sur la tristesse de certains jours, sur son « potentiel de ressentiment ». Elle ne marchandait pas avec la maladie. Elle avait décidé, dès qu’elle en avait appris la gravité, de la vivre pleinement. Les moments difficiles alternaient donc avec des instants de grand bonheur, de joie, d’émerveillement. Puis, au fil des pages, la sérénité et le sentiment de liberté n’ont cessé de grandir. Pour elle, terminer ce livre a été un grand moment de bonheur : elle avait tenu le contrat qu’elle avait passé avec elle-même, celui de témoigner, chose qu’elle a fait toute sa vie à travers ses livres et ses conférences. Pour moi, c’est le livre d’un maître. Il a la même qualité et la même portée pour notre monde que le journal d’Etty Hillesum (Son journal, Une vie bouleversée (Points, 1995), qu’elle débute à 27 ans, en 1941, évoque notamment son évolution spirituelle au cours des derniers mois de sa vie – elle est morte à Auschwitz en 1943).


Nous sommes dans un monde où l’expérience de mourir est refusée. On voudrait, comme le dit Benoîte Groult dans son dernier livre (La Touche étoile - LGF, “Le Livre de poche”, 2007), « appuyer sur la touche étoile » pour ne pas avoir à vivre son mourir. Le « temps du mourir » n’est pas valorisé. On se demande quel sens cela peut avoir de vivre encore quand on est condamné par la médecine. Christiane nous fait découvrir que ce temps est une aventure pleine de sens, l’occasion d’échanges d’une qualité exceptionnelle avec les autres, une plongée en soi dont on sort plus vivant encore. Tout cela, Christiane nous le révèle avec tellement de vérité que son expérience personnelle revêt une portée universelle. Nul doute que ce livre changera notre regard sur la vie et la mort.

Dans quel état d’esprit se trouvait-elle lors des jours qui ont précédé sa mort ?

Elle était dans l’acceptation. Chacun meurt comme il a vécu. Christiane a toujours eu cette passion, ce don de rechercher la merveille dans chaque chose. Elle a vécu cet ultime temps de vie avec la même passion. La dernière fois que je l’ai eue au téléphone, elle m’a dit : « Je suis loin, très loin, mais je suis bien. » Ce qui m’a frappée, quand je suis allée lui dire au revoir, à Vienne, en Autriche, en entrant dans sa chambre, c’est le paradoxe entre les signes évidents de sa mort prochaine, sa maigreur, sa fragilité physique, et puis l’énergie qui débordait d’elle et qui régnait dans la chambre. Son regard, son sourire étaient pleins de vitalité. Elle reposait les mains ouvertes, sans attente, prête à tout.