samedi 27 décembre 2014

C'est quoi devenir adulte dans le monde d'aujourd'hui ?


LU DANS LE MONDE

La jeunesse actuelle a-t-elle envie de devenir adulte ? POST DE BLOG

Aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, plusieurs constatent un désintérêt global des générations actuelles à répéter les schémas parentaux : avoir une maison, des enfants, une carrière.

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/actualite-en-continu/#GuUMTytMMqQTp5Jk.99



Etre adulte serait-il d'avoir envie d'une maison, d'enfants, de faire carrière.... ? ...une carrière de CDD successifs ? peut-être faut-il élargir cette notion et l'adapter à ce qu'offre notre monde actuel comme potentiel, vouloir moins pour que d'autres puissent eux aussi, vouloir, et être mieux, ETRE .....

Le désintérêt peut se comprendre vu la conjoncture actuelle, sur le plan de l'économie, des perspectives de trouver un travail dans lequel se réaliser, l'impact de la pollution, les déchets de la consommation galopante....  vouloir AVOIR a ses limites et de plus en plus de jeunes en sont conscients.

L'hôpital qui écoute ses patients

L’hôpital qui soigne… au whisky !

Chère lectrice, cher lecteur (écrit de Jean-Marc DUPUIS), 

J'adore quand des lecteurs me signalent de bonnes nouvelles que je n'avais pas vues. 

Depuis septembre 2014, le CHU (centre hospitalier universitaire, autrement dit l'énorme hôpital) de Clermont-Ferrand, a décidé d'autoriser ses patients en fin de vie à boire du whisky [1]. 

Et non seulement ça, mais l'hôpital a décidé de créer un bar à vin, dans lequel pourraient bientôt être servis des grands crus, c'est-à-dire des vins issus d'une vigne reconnue pour son exceptionnelle qualité, dans une atmosphère conviviale.

Moins bien traité qu'un condamné à mort

Il est vrai que la situation actuelle était grotesque : sous prétexte qu'on était à l'hôpital, les « patients » en soins palliatifs (fin de vie) étaient privés de la plupart des petits plaisirs de l’existence. 

Mais à quoi bon, je vous le demande, priver une personne dont le décès à court terme est médicalement certain, de boire un verre du whisky si ça lui fait plaisir ? 

Au nom de quoi vouloir empêcher un patient en fin de vie de manger ce qu'il aime, même si c'est « mauvais pour la santé », voire – vous allez voir que j'ose tout :) – manger du poulet rôti avec la peau grillée, avec des frites et de la mayonnaise (avec les doigts), du steak saignant au barbecue avec plein de béarnaise, se bourrer de « banana split » (avec double crème chantilly) fumer une cigarette, ou même… des cigarettes, si le patient aime ça, et s’il le peut bien sûr ? Et voir des films drôles ! 

Et j'irais encore plus loin : il faut le faire – si on en a la force. Car lorsqu'un patient est « condamné » par la médecine, il y a toujours un espoir de guérison. Mais encore faut-il que le patient ait en lui les forces spirituelles de vouloir guérir

Le corps étant à bout, ce sont les forces de l'esprit qui pourront faire la différence. Les guérisons « miraculeuses » ont souvent lieu dans un contexte de reprise d'espoir, de redécouverte du sens de la vie, chez le patient qui trouve une excellente raison de guérir… et guérit. Il est donc capital de tout miser sur le moral du patient. Son environnement, son entourage humain sont alors déterminants, et je prétends que si l'on créait dans tous les centres de soins palliatifs des endroits où l’on prend du bon temps, on assisterait plus souvent à des miracles. 

Beaucoup y travaillent activement, comme le Centre Jeanne Garnier à Paris, et c'est tout à leur honneur. 

Certains s'offusqueront du coût, mais un séjour en soins palliatifs coûte en moyenne 6529 euros [2]. Un verre de whisky coûte 3 euros. Un verre tiré d'une très bonne bouteille coûte 5 euros. Un paquet de cigarettes coûte 4 euros. 

Et nous parlons de personnes qui, généralement, n'en ont plus que pour 2 semaines à vivre ! À quoi bon prétendre leur faire la morale ? Leur imposer des privations jusqu'au dernier moment ? Autrefois, le condamné à mort lui-même, quel que soit son crime, avait droit à une dernière cigarette. Aujourd'hui, des innocents sont condamnés à mourir intubés de partout, mais n'auraient pas le droit de boire un dernier verre, ni de fumer une dernière cigarette, parce que le règlement de l'hôpital l'interdit. Quel scandale. Quel manque d'humanité. 

Mais ne nous voilons pas la face : si cela n'a pas été fait plus tôt, ce n'était pas à cause du coût, mais à cause de réglementations tatillonnes et imbéciles

Alors bravo au Dr Virginie Guastella, du CHU de Clermont-Ferrand, qui a su dire « m*** » au règlement et aux ronchons. 

À votre santé ! 

Jean-Marc Dupuis 

Une chose me dérange dans cet écrit : le titre .... "l'hôpital qui soigne" ; je dirai plutôt, l'hôpital qui écoute et accompagne respectueusement ses patients... pour éviter l'amalgame : wisky = médicament ...

elle voulait juste manger un oeuf, un vrai, avant de mourir....

Thérèse H. avait presque cent ans. La vie lui adressait un dernier sourire, une embellie fugitive, le dernier soleil avant la nuit. Et avant de partir, sans drame, il lui restait juste une dernière envie, une dernière faveur à demander. 


Il fallait que ce soit bien important pour qu'elle ose ! Thérèse avait toujours eu scrupule à déranger, à réclamer quoi que ce soit… Elle était discrète comme une souris ! Pourtant, ce matin-là, quand le directeur de l'établissement passe la voir, et bien, pour une fois, elle a une requête à lui présenter… 

Elle voulait juste un œuf à 30 centimes !

Oh, pas grand chose ! Thérèse, qu’on ne nourrit plus que par perfusion, voulait simplement manger un œuf à la coque ! 

– Avec une pincée de sel, ajoute-t-elle, et une mouillette, une bonne mouillette de pain frais, bien beurrée. 

Le directeur s'empresse d'accepter. Il est heureux de pouvoir donner satisfaction, ému aussi. Car il a bien compris, lui : ce que demande Thérèse, c’est en somme sa dernière volonté. 

Sans se douter de ce qui l’attend, le directeur file à la cuisine pour passer commande de son œuf.

Surprise, stupéfaction ! Le cuisinier lui oppose un refus catégorique. Pas question de faire entrer dans l’établissement un œuf dans sa coquille – même de première fraîcheur. Le règlement l’interdit, question de sécurité alimentaire ! L’œuf autorisé, l’œuf réglementaire, c’est un produit en Tetra Brick, un point c’est tout. Ceci pour préserver la santé des pensionnaires. 

Le directeur tente vainement de vaincre la résistance de son maître cuisinier, qui ne veut pas se mettre dans son tort. Il s'efforce ensuite de convaincre la diététicienne, mais il est confronté à un argument sans réplique : le règlement, c’est le règlement ! 

Alors il se tourne vers les associés actionnaires de l’établissement, qui refusent eux aussi toute entorse à la règle ! Il est vrai qu’on risque gros, l'interdiction, la fermeture, si la « faute » commise venait à s’ébruiter et arriver aux grandes oreilles de l’autorité administrative. 

Voilà pourquoi Thérèse a attendu son œuf. Elle s'est étonnée de ne pas le voir arriver. Elle s'est demandé pourquoi on lui refusait ce dernier petit plaisir… Puis elle est morte, le lendemain, en silence. 

Article dans "Alternative Bien-être".




mardi 23 décembre 2014

LA SOBRIETE, ANTIDOTE DE L’AUSTERITE


  La période des cadeaux nous invite à réfléchir au sens du don, à la qualité du don, tant il est vrai qu’il est plus difficile de donner de soi que de donner des objets. La  controverse sur le travail le dimanche rouvre aussi un débat complexe sur ce qui est essentiel dans nos sociétés : s’organiser librement pour travailler et consommer quand et comme on veut, aller dans les temples de la consommation le dimanche, préserver des équilibres de vie personnels et familiaux, rompre le rythme de nos activités pour se réserver du temps de ressourcement et de convivialité.
Derrière ce débat délicat, c’est tout notre modèle de société qui est en jeu : entre une société où la (sur)consommation, parfois compulsive, accompagnée de sous-consommation dramatique due à l’exclusion, au chômage et à la précarité, s’efforce de faire fonctionner une économie de marché basée sur une croissance sans limites, ou une société qui choisit une sobriété partagée, une abondance frugale afin de sortir de cette austérité inégalitaire qui s’impose de plus en plus. Nous sommes tous en quelque sorte malades du temps : temps contraint et comprimé pour les uns, temps vide et stérile pour les autres. Comment en guérir ?
Il s’agit de reconsidérer et d’élargir la notion de richesse. D’admettre que celle-ci est autant relationnelle et spirituelle que matérielle, avec tout ce que cela implique en termes d’usages du temps ; la sobriété partagée devient alors la ligne d’horizon d’une mondialisation réussie et d’une démocratie authentique, retrouvant ses sources spirituelles profondes et permettant à chacun de donner le meilleur de lui-même au service de tous. La gestion de l’argent et de la monnaie doit être mise au service de cette quête.
Le Pacte civique dès le départ a choisi de promouvoir cette sobriété partagée porteuse de plus de justice et de fraternité, une sobriété créative, proposant des temps de pause pour réfléchir au sens de son action, invitant à consacrer du temps et/ou de l’argent à des actions de solidarité, de promouvoir les équilibres écologiques, enrichissant la vie sociale et permettant le plein emploi de toutes les capacités.
A nous dans la nouvelle phase du Pacte civique d’approfondir la façon de rendre cohérente nos vies avec la recherche de cette sobriété heureuse, de cette abondance frugale, et d’en faire passer le message dans toute la société et particulièrement dans les institutions et les actions publiques. Tel est le vœu que nous formulons.

LETTRE  DU PACTE CIVIQUE DECEMBRE 2014

mardi 16 décembre 2014

Des frigos en libre-service pour diminuer le gaspillage (BERLIN)


Une association berlinoise récolte les invendus des magasins et les entrepose dans des frigos en libre-service. Le gaspillage alimentaire reste un fléau de notre société occidentale.
A Berlin, et plus particulièrement ici à Kreuzberg, les frigos du cœur connaissent un franc succès (Crédits image : Le Matin/DR)
À Berlin, et plus particulièrement ici à Kreuzberg, les frigos du cœur connaissent un franc succès (Crédits image : Le Matin/DR)
Dix millions de tonnes. C’est la masse que représente en France le gaspillage alimentaire, particuliers et distributeurs compris. Outre-Rhin, pour lutter à sa manière contre ce gigantesque gâchis, l’association Lebensmittelretter (“les sauveurs de nourriture”), a mis en place un réseau de frigos urbains à Berlin afin de récupérer des aliments et de les proposer en accès libre. On les retrouve auprès de magasins soutenant l’initiative ou bien sur la voie publique, en libre service, 24/7, tout simplement.
Comment ça marche ? Grâce au volontariat : 1 700 bénévoles berlinois de l’association parcourent les magasins à la recherche des denrées qui ne peuvent plus être vendues mais sont toujours consommables. Depuis 2012, on estime qu’ils ont pu sauver des tonnes de nourriture du gaspillage en les rangeant dans ces frigos populaires, pour offrir quelques ressources alimentaires à destination des plus pauvres.

“On ne sait jamais ce qu’on y trouvera”

Selon Lisa Fialik, bénévole interviewée par le Tagesspiegel, cette initiative séduit de nombreux citoyens, et même au-delà : “Les appareils sont remplis jusqu’à trois fois par jour par des Berlinois de tous âges, et même par des touristes.” Le quotidien allemand présentait l’initiative citoyenne fin octobre :
On peut y déposer les aliments, mais aussi bien sûr les prendre. C’est donc une sorte de supermarché ouvert 24 heures sur 24 qui offre un effet de surprise : on ne sait jamais ce qu’on y trouvera.
L’association Lebensmittelretter, forte de 1 700 bénévoles dévoués dans la capitale, s’enorgueillit aussi de 8 000 bénévoles à travers toute l’Allemagne. Mais ils peuvent aussi compter sur plus d’un millier de supermarchés partenaires dans tout le pays.

Empêcher le gaspillage, c’est économiser

Une chaîne de magasins bio, Bio Company, est la première à avoir soutenu l’initiative. Commerapporté par Slate, son directeur rappelle qu’en plus de la catastrophe du gaspillage, économiser les invendus pour les offrir à cette association peut aussi être source de revenus :
Cela a nécessité un peu de travail pour convaincre en interne, mais presque toutes les filiales de Bio Company à Berlin, Potsdam et Hambourg y participent désormais. Presque plus rien ne va désormais à la poubelle. Le fait que nous ayons besoin de beaucoup moins de place pour les containers et qu’en plus nous ayons moins de coûts est un effet secondaire bienvenu.
Article de  KONBINI
Pour aller plus loin, le New York Times a consacré un reportage à ces frigos du cœur dans son édition numérique. Il est à lire (en anglais) ici.

lundi 15 décembre 2014

La question du sens de la vie

Ce n'est pas l'homme qui pose la question à la vie, c'est la vie même qui est telle qu'elle pose question à l'homme.
La question : "Qu'est-ce que j'attends de la vie ?"..... peut être remplacée par : "qui ou quoi m'attend ?" "qui attend quoi de moi ?"
l'homme ne devrait pas se demander quelle est sa raison de vivre mais bien reconnaître que c'est à lui que la question est posée. En un mot, chaque homme fait face à une question que lui pose l'existence et il ne peut y répondre qu'en prenant sa propre vie en main.
La responsabilité est l'essence même de l'existence humaine.
C'est à chacun qu'il incombe de choisir ce dont il veut être responsable, envers quoi ou envers qui : devant la société, devant l'humanité, devant la conscience, ou responsabilité non pas devant quelque chose, mais devant quelqu'un devant la divinité.
Lu dans le livre de Pascal LE VAOU "une psychothérapie existentielle"


mardi 9 décembre 2014

La Nature n’est pas un business

Du 24 novembre au 6 décembre, la Quinzaine amazonienne a permis à trois chefs indiens d’Amazonie de transmettre un message qui nous concerne tous. Retour sur cet évènement.

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Dans les rues de Paris, leurs chapeaux ornés de plumes, maquillage tribal et tenue colorée ne passent pas inaperçus. Benki Piyâko Ashaninka, Puwê Luis Puyanawa et Walter Lopez Shipibo ont fait un long voyage pour rejoindre la capitale. Tous trois sont des chefs indiens originaires de l’Acre, région frontalière de l’Amazonie brésilienne et péruvienne. Leurs communautés y ont toujours vécu en harmonie avec la nature mais à cause de la déforestation et l’avancée de l’urbanisation, ces leaders s’inquiètent pour l’avenir de leur peuple. Les incidences sur leur mode de vie ont des variantes, mais le problème reste le même : ‘’La terre est en train de mourir et il est de notre responsabilité à tous d’agir très vite, rappelle Benki. La nature n’est pas un business’’.
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Retrouver son autonomie et éduquer les jeunes générations
Pour Benki Ashaninka, il est essentiel que les Indiens retrouvent leur autonomie alimentaire : ‘’En détruisant notre forêt, les blancs sont devenus riches mais ils nous ont laissés pauvres. A cause de la déforestation et de la pollution des eaux, nous nous sommes retrouvés sans animaux, sans arbres, sans poissons dans les rivières, et nous devions acheter du riz, des biscuits et des conserves provenant de l’extérieur pour nous nourrir  alors que tout est dans la forêt’’ explique le leader qui a déjà réagi en créant une université des savoirs de la forêt. Créé en 2007, le centre Yorenka Âtame organise des programmes de reboisement et permet aux jeunes générations de réapprendre le mode de vie traditionnel. A ce jour, ils ont replanté 200 000 arbres mais ce n’est pour Benki que le début d’un long processus. Ce leader exemplaire a permis de restaurer toutes les espèces de plantes qui font vivre son village mais n’a récupéré que 25% de sa forêt.
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La fierté d’être Indien et la préservation des sites sacrés
Pour sa première visite en Europe, Puwê Puyanawa s’étonne de l’agitation dans les rues : ‘’Il y a des voitures partout et les gens courent dans tous les sens. Mais comment peut-on savoir où l’on va si l’on ne prend jamais le temps d’observer ce qu’il se passe et de penser’’. Sa communauté vivant tout près d‘une ville, ce chef est très critique sur les effets néfastes de l’urbanisation. Cette proximité avec le monde moderne lui demande un effort constant pour souder sa communauté et empêcher que les jeunes ne tombent dans l’alcool, la drogue, voire même la prostitution. Depuis peu, le gouvernement brésilien envisage de faire construire une route à l’endroit même où se trouve un site sacré puyanawa. Pour réagir, Puwê tente de réunir des fonds pour de racheter la terre de ses ancêtres : ‘’Les indigènes ont le droit d’occuper un territoire mais le gouvernement garde le droit de l’exploiter pour construire une route ou encore en explorer les sous-sols pour chercher du pétrole et d’autres ressources’’  se désole-t-il.
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Réactiver la culture
 traditionnelle et fédérer les peuples‘’Les occidentaux pensent à leur business sans penser à nous. Ce qui est à eux restent à eux, et ce qui est à nous se négocie’’ s’insurge Walter Shipibo. Mais pour ce chef péruvien, les dégâts ont commencé bien avant la destruction de la forêt : ‘’Avant l’évangélisation, nous vivions en contact direct avec les Esprits de la nature mais les premiers colons nous ont déconnecté de nos croyances ancestrales en interdisant certaines pratiques. Plus tard, des scientifiques et des anthropologues se sont intéressés à nous comme si nous étions des plantes ou des animaux, avec le seul but de rentrer chez eux avec un doctorat ! Notre connaissance de la nature a fait avancer la science mais qu’en avons nous tirer de positif ?’’ Très inquiet, le chef péruvien espère organiser un grand festival au mois d’aout 2015 pour fédérer les peuples. Réactiver la culture traditionnelle est pour lui le moyen le plus efficace pour qu’un changement s’opère. Unis, ils seront plus forts pour se faire entendre. ‘’Nous vivons sur un espace de 12 millions d’hectares et seulement 62 communautés sont reconnues politiquement alors qu’il en existe 354.’’
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Un échange de connaissancesConfrontés à des menaces de mort régulières dans leur pays, ces chefs indiens doivent s’unir à des associations pour pouvoir faire passer leur message. En France, ils ont trouvé un soutien pour organiser des rencontres et des programmes de sensibilisation auprès des associations Akiri et Cœur de forêt ainsi que l’artiste Franz Kracjberg. ‘’Nous ne sommes pas ici pour demander mais pour échanger des connaissances’’ précise Benki. Regardez comment la science avance grâce à notre enseignement. Mais la technologie n’atteindra jamais la richesse de la nature. Nous sommes donc ici aussi pour vous apporter notre degré de conscience et vous montrer comment nous réussissons à vivre en équilibre à travers notre savoir traditionnel.’’
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Présent lors de plusieurs rencontres, le chercheur en neuroscience cognitive Idriss Aberkane prend lui aussi la parole pour les soutenir : ‘’Les Indiens sont un trésor pour l’humanité. Alors que nous apprenons à peine à comprendre la nature, les Indiens la lisent comme si elle était une immense bibliothèque de savoirs’’.
La technologie comme arme de défenseLes Indiens utilisent internet autant pour diffuser leur message que pour informer sur ce qui se passe sur leurs terres parfois très retirées : ‘’Entre 2003 et 2005, les Ashaninka brésiliens ont rencontré des problèmes avec des compagnies péruviennes qui venaient couper du bois sur leur territoire. Ils étaient quasiment en guerre et c’est grâce à internet qu’ils ont pu trouver de l’aide, explique Eliane Fernandes, anthropologue spécialisée dans les questions liées à l’environnement. Consciente des effets négatifs que pourrait aussi avoir internet sur les jeunes, elle précise : ‘’la technologie peut être une grande force pour une communauté si elle est soudée. J’ai remarqué que parfois, les jeunes étaient tentés par la ville, mais ils reviennent toujours. En plus, il y a deux ordinateurs au maximum par communauté, et ils ne s’en servent qu’avec le but de communiquer sur les problèmes qu’ils rencontrent.’’
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L’expédition Tsonkiri pour réunir les peuples transfrontaliersToujours pour réunir les communautés entre elles et préserver leur culture autant que leur environnement, une expédition de plusieurs mois est prévue pour mai 2015. Plusieurs leaders Ashaninka du Brésil vont ainsi reprendre la route vers Pérou pour retrouver les autres chefs de cette communauté aujourd’hui disséminée. Leur parcours devrait s’achever en aout 2015 avec la fête Shipinawa Bakebo qu'organise Walter Shipibo dans son village. L’ensemble de l’expédition fera l’objet d’un film de 52 minutes destiné à l’international et une version de 26 minutes destinée aux Indiens.
Avant de quitter le territoire français, les trois chefs indiens ont remis une lettre au ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius. Pour Puwê Puyanawa, c’est une bénédiction qu’il puisse être ici pour transmettre son message. Conscient que tout ceci n’est que le début d’un long processus, il en appelle à l’Esprit de la forêt pour lui permettre de continuer. Espérons que le grand Esprit les accompagnera encore longtemps.
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Texte : Géraldine Rué

Photos : Anouk Garcia
En savoir plus :
Découvrir la région de l'Acre : Fondatrice de l'association Akiri, la reporter photographe Anouk Garcia travaille depuis plusieurs années sur la région de l'Acre et tente de venir en aide à ces communautés : www.anoukgarcia.comDécouvrir de l'association Akiri : www.akiri.fr
et l'Association Cœur de forêt : www.coeurdeforet.com
Soutenir l'Expédition Tsonkiri : akiri.fr/Tsonkiri

lundi 8 décembre 2014

Ce que nous tissons ensemble


"Non seulement je suis sûr que ce que je vais dire est faux mais je suis sûr aussi que ce qu'on m'objectera sera faux et pourtant il n'y a pas d'autre choix que de se mettre à en parler..."
Est faux ce qui fleure la théorie.
Est juste - comme en musique - ce qui soudain résonne de l'un à l'autre, se propage comme une onde vibratoire.
Veillez donc à ne pas gaspiller d'énergie à tenter de me donner tort ou raison. Ce qui importe, c'est ce filet d'interrogations, d"hésitations, de conjectures que nous tissons ensemble, et où un son peut être à un certain moment, apparaît juste."

Christiane Singer  - Où cours tu ? Ne vois tu pas que le ciel est en toi ? 

dimanche 30 novembre 2014

les faits - l'attitude

Les faits ne sont pas une fatalité, ce qui importe, c'est l'attitude que nous adoptons à leur égard.

Ces personnes différentes

Paroles de Carl J. Rote, aumônier d'une institution de patients retardés mentaux, en 1965 :

"les retardés mentaux m'ont appris bien plus que ce que je ne saurais dire. Leur monde est un monde d'où l'hypocrisie est bannie ; c'est un royaume dans lequel le sourire est leur passeport pour gagner votre affection ; la lumière de leurs yeux ferait fondre le coeur le plus endurci. Peut-être est-ce le chemin pour nous rappeler que le monde doit redécouvrir des qualités que les retardés mentaux n'ont jamais perdues !"

Ecrit de W.M. MILLER, professeur d'hygiène mentale en Ecosse, en 1964.

"Il y a quelque chose de radicalement faux dans l'idée que la plénitude personnelle doit équivaloir à la bonne santé mentale et qu'un individu n'est pas achevé si la psychiatrie n'est pas en mesure de lui décerner un certificat de normalité. Qu'en est-il alors de l'enfant idiot, du schizophrène prostré, ou du patient atteint de démence sénile ? Quel réconfort pourrions-nous leur apporter si nous nous limitons nous-même à cette notion d'intégrité physico-mentale ? Il doit certainement y avoir un sens en vertu duquel ces créatures sont achevées, même si leur situation est sans espoir de guérison".

samedi 29 novembre 2014

Les fondations de notre Cathédrale intime

"La dépression est ma compagne fidèle. Elle pèse sur mon âme et elle l'écrase. Où sont donc passé mes idéaux, où et ma grandeur, le beauté et la divinité auxquelles j'ai consacré ma vie ? Il n'y a rien d'autre que l'ennui et je suis sa prisonnière. Je vis comme si j'était tombée au fond d'un gouffre. Il y a même des moments où l'expérience de la douleur m'est inaccessible. Et même Dieu garde le silence. J'ai alors envie de mourir. Aussi vite que possible. Et si je n'avais pas la conviction que je suis maîtresse de ma vie, j'y aurais mis fin. Grâce à cette croyance, malgré tout, la souffrance m'apparaît comme un don. Les gens qui pense que la vie doit être couronnée de succès ne peuvent pas comprendre que des ouvriers puissent creuser des fondations pour édifier une Cathédrale. Dieu a édifié une cathédrale en chaque âme. Il est en train de creuser les fondations de la mienne. Je n'ai qu'une seule chose à faire : tenir bon chaque fois que Sa pelle me heurte."

Lettre d'une Soeur Carmélite. Sa façon personnelle de traverser une période de vide existentiel.
Les mots peuvent changer, les croyances aussi mais le fond est important : tenir bon, avoir confiance et accepter que le sens nous reste caché aujourd'hui, peut-être demain encore.... juste se donner les moyens de rester debout.

dimanche 23 novembre 2014

le travail d'une vie

Passer de la question

"que m'apporte la vie ?"          à         "que puis-je apporter à la vie ?"


ou de

"pourquoi ça m'arrive à moi ?" à        "que puis-je apprendre de cette situation ou expérience ?"

au lieu de fustiger le passé et les autres, se donner les moyens de faire au mieux dans le présent, avec ce qui est car le passé ne se réécrit pas mais le présent se crée.

un critère pour faire ces choix dans la vie : "cela me permet-il de devenir meilleur ?"


le vide existentiel : un défi individuel.

(...) Lutter pour trouver un sens à sa vie ou se poser la question angoissante de savoir si sa vie a ou non un sens ne constitue pas en soi un phénomène pathologique. C'est même un privilège de ne pas tenir pour acquise l'idée que la vie a un sens mais, au contraire, de travailler à lui en donner un. Et lorsque, dans l'urgence nous sommes parfois sollicités pour apporter de l'aide à quelqu'un qui est en proie à un violent sentiment de vide existentiel, nous devons toujours le faire avec cette conviction.
Il n'y a vraiment pas lieu d'éprouver de la honte face au désespoir existentiel, sous prétexte que ce serait une maladie émotionnelle, parce qu'il ne s'agit nullement d'un symptôme névrotique mais d'une préoccupation tout à fait humaine. Plus que cela, c'est même l'expression d'une grande sincérité et d'une grande honnêteté intellectuelles.
Aussi si quelqu'un de jeune se donne pour priorité explicite, et se pose comme véritable défi, de définir le sens de sa vie, il devra faire preuve d'une grande patience, d'assez de patience pour attendre le moment où ce sens s'imposera à lui.(...)

Viktor Frankl

"les hommes ne sont pas des objets qui existent comme des chaises ou des tables ; ils vivent, et s'ils jugent que leurs vie sont réduites au rang de simples chaises et de tables, ils se suicident." Propos de W.I. THOMPSON 1962

dimanche 16 novembre 2014

Richesses philosophiques du Petit Prince

La santé du Petit Prince

Laurence Vanin, Docteur en philosophie politique et épistémologie répond aux question du Professeur Henri JOYEUX. 

1/ Le grand philosophe allemand Martin Heidegger écrivait dans la préface de l’édition allemande en 1949 du Petit Prince : « Ce n’est pas un livre pour enfant, c’est le message d’un grand poète qui soulage de toute solitude, et par lequel nous sommes amenés à la compréhension des grands mystères du monde. » Quels sont ces mystères ?   

Ces mystères ne sont peut-être que des vérités enfouies. Ils concernent « Les mystères de la vie bienheureuse » dès lors que chacun est conscient de sa fragilité, et que la vie est à préserver. Il importe de prendre soin de soi comme de l’humanité afin que notre sentiment d’appartenance au monde puisse être en permanence alimenté par une source salvatrice. 

La surconsommation, l’excès, l’accélération de nos rythmes de vie sont propices à l’oubli. Dès lors, les hommes se préoccupent de choses secondaires et se détournent de l’essentiel. Incontestablement, le Petit Prince lance un appel à l’éveil afin de méditer sur ce qui est fondamental mais invisible pour les yeux : l’amour. 

Il consiste en une mise en garde vis-à-vis du paraître et il incite à quérir l’Être des choses afin de parvenir au bonheur, parce que ce qui demeure imperceptible aux yeux ne peut l’être au cœur. Cependant, pour le comprendre – et surtout l’intégrer dans un projet collectif – Saint-Exupéry engage les hommes à conquérir leur humanité. Il les exhorte à préserver leur héritage culturel et à « habiter » le monde, non pas comme simples présences mais comme gardiens de valeurs spirituelles, structurelles et primordiales à assimiler en vue de façonner un nouveau monde axé sur l’essentiel… 

2/ Vous avez étudié longuement et dans le détail la vie de ce formidable pilote écrivain, Antoine de Saint-Exupéry, pionnier avec Mermoz des premiers vols intercontinentaux au risque de leur vie. Vous avez scruté sa pensée et ainsi décelé quelques énigmes qui touchent à la santé affective de sa personne. La rose s’oppose-t-elle au mouton enfermé dans sa boîte ?  

Le point commun de tous ces aventuriers est qu’ils avaient un être à chérir : une femme, qu’elle soit l’épouse ou la mère. 

Les nombreuses correspondances des uns et des autres à leur mère ou à leur épouse témoignent de la nécessité de l’attachement. Un homme courageux, amené à prendre de terribles risques a besoin d’un point d’ancrage affectif, « une rose » qui devient également un point sur lequel il fonde sa lucidité. 

Prendre des risques ce n’est pas chercher la mort, car si quelqu’un vous aime il attend votre retour ou vos lettres avec impatience et parfois avec inquiétude. L’amour est donc ce qui maintient la conscience en éveil et préserve les héros de terribles dangers. Il ne peut donc être tyrannique à l’image d’un mouton que l’on exige et que l’on finit par enfermer dans une boîte, et l’on ne peut abandonner « une rose » sans souffrir de son absence. L’amour ne peut être que don de soi et bienveillance à l’égard de l’être aimé. 

3/ Quelle est la condition d’homme, pour Saint-Exupéry ? La solitude du petit bonhomme dans le désert ou les épines sur les fleurs ? 

Je dirai que pour lui l’homme a le choix. Il peut investir son rôle et décider de ce qu’il veut. Il importe de lire ce récit du Petit Prince en gardant à l’esprit son objectif : penser la conversion du regard et recentrer l’homme dans une Humanité afin qu’il réinvestisse son rôle ! 

« Quand nous prendrons conscience de notre rôle, même le plus effacé, alors seulement nous serons heureux. Alors seulement nous pourrons vivre en paix et mourir en paix, car ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort. [1] »
Dès lors il paraît intéressant de s’interroger sur la mise en situation d’un homme incompris qui exécute un dessin et se trouve face à son destin (une panne de moteur en plein désert). Inéluctablement sa conscience s’en épuise… Sauf si elle parvient à transcender sa position de mortel afin de manifester sa liberté dans des actes volontaires. Elle déjoue alors les coups du sort et dépasse sa condition. Surtout si un petit prince vient à sa rencontre et l’amène à méditer sur son devenir… 

Lorsque l’idée d’un projet jaillit, qu’elle soit ou non initiée par la rencontre d’un petit être – sorte de révélation d’une possible attention nouvelle à la vie – il devient urgent d’agir et d’investir ses initiatives d’une autre signification. D’autant que Saint-Exupéry nous invite au voyage : quels sont ces mystérieux astéroïdes ? Quels messages leurs habitants ont-ils à délivrer ? 

Désormais, il convient au lecteur attentif de visiter les planètes en méditant sur le genre humain, ses égarements, ses démesures néfastes à son épanouissement. 

4/ Il n'est rien de plus fragile que le Petit Prince sur la terre ? Les grandes personnes très très bizarres ne l’ont-elles pas oublié aujourd’hui ? 

Connaître sa propre fragilité, n’est-ce pas le début de la sagesse qui peut éloigner le stress si néfaste à notre santé ? 

« Je connais une planète où il y a un monsieur cramoisi. Il n’a jamais respiré une fleur. Il n’a jamais regardé une étoile. Il n’a jamais aimé personne. Il n’a jamais rien fait d’autre que des additions. [2] » 
Effectivement, le Petit Prince s’avère être un personnage toujours en mouvement, insaisissable parce que l’idée est sans appel : l’immobilisme est la voie de l’absurdité de la vie. Le rayonnement de la pensée ne peut avoir lieu que dans une élévation spirituelle suscitée par la mobilité et l’action. 

Inversement, mourir revient à s’arrêter, se poser, être en proie… ou plutôt, être la proie consentante d’un serpent : comme l’est le Petit Prince en fin d’ouvrage… Méditer sur la mort n’est-ce pas déjà commencer de vivre pour renaître à « autre chose » ? Saint-Exupéry nous enseigne que l’homme doit éviter de s’égarer. Le stress, la peur du lendemain, conduisent les hommes à se comporter de manière illogique et dangereuse pour leur équilibre physique et mental. C’est pourquoi le Petit Prince est un guide qui enseigne la beauté du silence pour rompre avec le bruit des sociétés modernes ; il invite à se détourner des grandes personnes, trop affairistes, insipides, qui passent à côté de l’essentiel. 

La santé comme l’amour ne se conservent pas sur un compte en banque, et on ne peut vivre dans l’attachement aux choses matérielles, aux nourritures terrestres de façon abusive… Il importe donc de se recentrer sur soi pour se préparer à accueillir la simplicité des choses qui sont propices au bonheur, à l’équilibre et à la santé. 

5/ La soif d’apprendre de planète en planète ouvre le cœur aux dimensions du monde, mais rend toujours insatisfait. Pourquoi ?  

Effectivement, ceux qui se prennent un peu trop au sérieux, oublieux de vivre, passent à côté de la réalité, des êtres et du monde qui les entourent. Ils se détournent du concret pensant que la raison peut parvenir à tout élucider. Comme le précise notre auteur dans une de ses lettres : 

« J’aime les gens que le besoin de manger, de nourrir leurs enfants et d’atteindre le mois suivant ont liés de plus près avec la vie. Ils en savent long. […] Les gens du monde ne m’ont jamais rien enseigné. [3] »
Par suite, la visite de diverses planètes et l’examen de leurs habitants servent à mettre en évidence les travers de la raison et les excès des hommes. Ces derniers constituent des obstacles à la cohésion sociale. Saint-Exupéry procède alors selon deux axes distincts afin de montrer ce qui est nuisible à la communication :
  • Les critiques à l’égard du sérieux de certains individus qui ont placé dans leurs activités quotidiennes la totalité de leur concentration en négligeant la vie même.
  • Les illusions vitales qui permettent aux êtres de croire au bonheur alors qu’ils évoluent dans des paradis artificiels. Ils sont victimes de leurs opinions.
Visiter toutes ces planètes doit donc favoriser un temps d’introspection pour que chacun puisse, en soi, se ressourcer… Mais ce travail est difficile et souvent les hommes se refusent à entreprendre ce travail sur soi, bien qu’il soit salvateur. Apprendre à se connaître c’est aussi pouvoir s’écouter et vivre en harmonie avec soi. 

6/ Apprivoiser le renard, n’est-ce pas prendre son temps pour aimer et se sentir aimé ?   

La curieuse rencontre du renard coïncide avec l’épisode, insolite, du face à face entre deux êtres différents qui se découvrent et de l’éveil affectif qui s’ensuivra. Toutefois, notons que ce renard fait référence à un fennec pour lequel, lors de son accident d’Égypte au cours de la tentative du raid Paris-Saïgon, Saint-Exupéry se passionna et qu’il amadoua à force d’observation et de patience. Ce renard dont il est déjà question dans Terre des hommes : 

« Mon petit renard, je suis foutu, mais c’est curieux, cela ne m’a pas empêché de m’intéresser à ton humeur. [4] »
L’amitié enseigne au Petit Prince que les relations entre les êtres nécessitent de l’amour, du don de soi et de l’abnégation. Le renard, animal sauvage, met ainsi en évidence la question du temps qu’il faut consacrer à quelqu’un pour l’apprivoiser. 

« Il faut être très patient, répondit le renard. Tu t’assoiras d’abord un peu loin de moi, comme ça, dans l’herbe. Je te regarderai du coin de l’œil et tu ne diras rien. Le langage est source de malentendus. Mais, chaque jour, tu pourras t’asseoir un peu plus près… [5] » 
Là où le mouton n’était que l’animal domestique – le souhait exprimé, « dessine-moi un mouton », comme un caprice à la manière dont chacun pourrait vouloir un chien ou un chat pour lui tenir compagnie –, la rencontre avec le renard propose, en réalité, de créer des liens de confiance et d’introduire des valeurs. L’amitié nécessite d’ajuster son caractère, d’apprendre à partager, à échanger, à donner. L’homme prend conscience que, contrairement aux relations professionnelles ou de voisinage, il peut s’adresser à son ami d’égal à égal en acceptant ses différences, dans l’exclusivité des moments de rencontre au cours desquels « il s’habille le cœur ». L’amitié ouvre à la tolérance [6]. 

Saint-Exupéry explique qu’il faut des rites, un cérémonial. Certes, lorsque nous attendons des amis, ils convient de bien les accueillir. Toutefois, il faut un protocole, à savoir des horaires, des préparatifs, des choses à partager… Cela semble si évident et pourtant si complexe en réalité. Les relations se nouent quand des liens se tissent, quand le besoin de se rencontrer fréquemment se fait sentir, s’installe et s’organise. L’amitié n’autorise pas tout. Elle ne permet pas l’intrusion intempestive, les abus, les rivalités. Elle appelle au respect et à la prise en compte des besoins de l’autre. L’amitié permet donc d’aimer et de se sentir aimé, de savoir que l’on n’est pas seul et que votre cœur « s’habille d’une autre couleur » ! 

7/ Découvrir le prix du bonheur, comment Saint-Exupéry conçoit-il cette conquête ? 

Les hommes s’illustrent parfois par leur frivolité et ne font pas toujours preuve de bon sens. Souvent, ils s’affairent à des activités secondaires ou dérisoires. Ils ne sont pas spécialement distraits, mais leurs pensées se sont canalisées sur de « sérieuses » futilités. Ils passent à côté de l’essentiel et ne le voient pas. La raison, dans sa prétention au savoir, a longtemps cru qu’elle pouvait élucider tous les problèmes, notamment depuis que Descartes a prétendu que grâce à elle, et consécutivement à la science, l’homme allait pouvoir se « rendre maître et possesseur de la nature »

Néanmoins, les scientifiques, depuis qu’ils ont traduit les phénomènes naturels en chiffres et qu’ils ont mathématisé l’univers, se concentrent ainsi sur leurs travaux et occultent la prise en compte de l’homme, de son humanité. La conception scientifique du monde se représente principalement un univers formé d’abstractions, codifié par des formules et des lois mathématiques. Partant, Saint-Exupéry lui reproche d’avoir quantifié l’univers et d’avoir omis d’évoquer ce qui échappe à la traduction en données chiffrées, ou en termes de statistiques ; mais conserve toute son importance : l’humanité habitant le monde. 

Ainsi le bonheur est à trouver dans la réalisation des actes quotidiens, lorsque nous mettons du cœur dans nos actions et qu’elles ont du sens. 

8/ Est-ce que la nature ne laisse aucune chance aux faibles ? Est-ce l’influence du Darwinisme social qui a fait et continue de faire tant de dégâts sur la planète ? 

Peut-être… Toutefois, dans la nature, si un animal en tue un autre c’est pour se nourrir ou rester en vie. Il ne tue pas gratuitement, ni même ne détruit gratuitement. Mais pour ce qui est des hommes… Nous vivons à crédit car les hommes ne voient plus dans le lointain ; oublieux du bon sens ils privilégient la technique, la rapidité, le profit et ils méprisent la vie, leur avenir et celui de leurs enfants, la planète, le règne animal. Méditer nos choix, comprendre nos égarements pourrait peut-être influencer nos décisions et les politiques à venir que nous choisissons en votant pour l’élection des hommes politiques qui sont en charge de la Cité. Nous sommes des citoyens du monde et notre devoir est de le préserver, y compris de la bêtise humaine rivée à sa jalousie. 

9/ Que dit Saint-Exupéry aux jeunes d’aujourd’hui ? 

Il s’est bien gardé de leur faire la morale. Il les invite simplement à la vigilance afin de détruire les mauvaises herbes. Il use alors de métaphore avec le drame des baobabs afin d’aborder la question du bien et du mal comme référence à la morale religieuse « des arbres grands comme des églises ». 

Saint-Exupéry expose, dans ce texte, une vision manichéenne du monde qu’il décline sous l’image des bonnes ou mauvaises herbes. Il appelle à la vigilance et lance un avertissement aux enfants parce qu’ils sont vulnérables. Effectivement, la morale, tout comme l’éveil de l’intelligence, n’est pas instantanée. Il s’agit, plutôt, du fruit d’une éducation, d’une intégration progressive accomplie au cours de diverses expériences propices à l’acquisition de l’autonomie intellectuelle, au respect des consignes liées à la vie en communauté et d’une aptitude à discerner le bien et le mal. Cette application au bien peut conduire les hommes au bonheur et à l’épanouissement personnel. La norme à suivre constitue, également, une valeur à intégrer et à transmettre aux enfants pour qu’ils puissent agir conformément à la morale, se soustraire au mal afin de s’en préserver. 

« Je n’aime guère prendre le ton d’un moraliste. Mais le danger des baobabs est si peu connu, et les risques courus par celui qui s’égarerait dans un astéroïde sont si considérables, que, pour une fois, je fais exception à ma réserve. Je dis : « Enfants ! Faites attention aux baobabs ! [7] »


Le besoin d’unité et d’harmonie incite l’homme à régler son comportement sur une conception dynamique – comme force « promouvante » du bien – sous la prépondérance de l’amour polarisé sur l’humanité conçue dans la fraternité. Saint-Exupéry lance donc un appel et exhorte à davantage de vigilance. 

Certes, il existe des mauvaises herbes, elles se montreront extrêmement dévastatrices si les hommes les laissent pousser et corrompre les rapports humains. Au regard de l’humanité, le devoir revient à lutter et à éradiquer le mal, ainsi qu’à éduquer les enfants en vue du bien. 

« C’est une question de discipline, me disait plus tard le petit prince. Quand on a terminé sa toilette du matin, il faut faire soigneusement la toilette de la planète. Il faut s’astreindre régulièrement à arracher les baobabs dès qu’on les distingue d’avec les rosiers auxquels ils ressemblent beaucoup quand ils sont très jeunes. C’est un travail très ennuyeux, mais très facile. »

Et un jour il me conseilla de m’appliquer à réussir un beau dessin, pour bien faire entrer ça dans la tête des enfants de chez moi. « Sils voyagent un jour, me disait-il, ça pourra leur servir. Il est quelquefois sans inconvénient de remettre à plus tard son travail. Mais, s’il s’agit des baobabs, c’est toujours une catastrophe. J’ai connu une planète, habitée par un paresseux. Il avait négligé trois arbustes…[8] » 
10/ Secourir ses compagnons naufragés en terres hostiles, les liens de fraternité chez Saint-Exupéry, n’est-ce pas la racine des Médecins du Monde ? 

Aux sources profondes de la vie se trouve la spatialisation de la responsabilité, le véritabletrésor comme le précise Saint-Exupéry, un essentiel invisible aux yeux, mais perceptible à un cœur ouvert à la fraternité. « […] Je viens de donner trois cigarettes à un mendiant parce qu’il avait l’air si heureux que j’ai voulu faire durer ce visage. [9] » L’homme n’est pas une entité figée dans la temporalité qui est la sienne. Il s’investit dans le monde et s’y parachève. C’est en cela sans doute que l’homme peut s’engager par exemple dans l’humanitaire, Médecins du Monde par exemple, ou intégrer des métiers qui nécessitent de l’engagement et du dévouement. Il peut ainsi porter son attention à un autre que lui-même. Autrui ne doit pas être traité comme un simple moyen. Il ne peut être instrumentalisé pour servir la cause ou la carrière d’un être arriviste et sans morale. L’autre doit figurer comme limite à nos désordres, à nos excès pour être ensuite reconnu comme une humanité à respecter et protéger. En renonçant aux exigences de l’égoïsme, chacun peut s’épanouir dans le partage. Comme le précisait Saint-Exupéry dansTerre des hommes : 

« Je ne me souviendrai jamais de ton visage. Tu es l’Homme et tu m’apparais avec le visage de tous les hommes à la fois. Tu ne nous as jamais dévisagés et déjà tu nous as reconnus. Tu es le frère bien-aimé. Et, à mon tour, je te reconnaîtrai dans tous les hommes. [10] »
Les opérations des hommes doivent se conformer à un ordre intelligible, qui ne leur appartient pas, mais auquel ils contribuent car leur accomplissement exige qu’ils deviennent « Homme ». L’auteur privilégie la discipline, la foi en l’homme et pense le devenir dans la réalisation de l’Homme par l’homme. Ainsi dans mon ouvrage je me suis attardée à expliquer tous les symboles auxquels Saint-Exupéry s’est référé et il est vrai que lire Le Petit Prince éclairé de toutes ces significations permet de mieux méditer sur l’existence et contribuer à la « Bonne Santé » ! 

Laurence Vanin 

*Docteur en philosophie politique et épistémologie, enseigne à l’Université de Toulon- Auteur de « L’Enigme de la Rose - Richesses philosophiques du Petit Prince » Ed OVADIA 2014 

mardi 4 novembre 2014

L'ennui en l'absence de projet

la société d'abondance est une société qui manque totalement d'exigences et c'est pourquoi les gens manquent de tonus ; toutefois les gens auxquels cette tension fait défaut sont enclins à la recréer, soit d'une manière saine (le sport par exemple), soit d'une manière malsaine (les conduites à risques...).

La tension ne doit pas être absolument évitée car la paix de l'esprit ou la paix de l'âme ne s'obtient pas à n'importe quelles conditions. Il faut avouer qu'un certain degré de tension, telle que celle qui est dépensée lorsqu'on s'investit dans un projet, est inhérent à l'être humain et même indispensable à sa bonne santé mentale. Ce dont l'être humain a besoin, c'est de la tension constitutive inhérente à une direction de sens donnée. Freud a écrit que "les hommes restent forts aussi longtemps qu'ils vivent pour une idée forte".

Episode significatif s'étant produit à l'Université de Berckeley en Californie :
Quand les piquets de grève ont commencé à défiler, le nombre d'admissions dans le service de psychiatrie a considérablement chuté. Par la suite, il a beaucoup augmenté une fois que la protestation a pris fin. Durant quelques mois, les étudiants avaient trouvé un sens grâce au mouvement en faveur de la liberté d'expression.

lu dans "nos raisons de vivre" Viktor Frankl

A méditer

l'évolution ontogénétique de l'homme

La vie est une Zeitgestalt (une forme temporelle) et en tant que telle, elle devient quelque chose de complet et de significatif seulement quand elle parvient à son terme :

Le principe de plaisir freudien est le principe directeur qui oriente la vie du jeune enfant,

tandis que le principe de puissance adlérien caractérise la vie de l'adolescent

et qu'enfin la volonté de sens constitue le principe organisateur de l'existence adulte.

Ainsi (d'après A. UNGERSMA qui a étudié une autre approche de la psychothérapie) ainsi le développement des trois écoles viennoises peut être considérée dans l'optique de l'évolution ontogénétique de l'individu, depuis l'enfance jusqu'à la maturité.

lu dans "nos raisons de vivre" par Viktor Frankl

jeudi 30 octobre 2014

L'homme qui plantait des arbres

INSOLITEInde : l’homme qui a planté une forêt de ses mains

A lui tout seul, Jadav Payeng a fait pousser une vaste forêt sur un banc de sable de 550 hectares situé au milieu du fleuve Brahmapoutre. Le site compte désormais plusieurs animaux dont l’espèce est en voie de disparition, dont au moins cinq tigres. Une femelle a eu deux petits récemment. L’endroit se situe à Jorhat, à 350 kilomètres de route de Guwahati, et il n’est pas facile d’accès. Il faut quitter la voie principale et prendre une petite route sur une trentaine de kilomètres pour arriver au fleuve. Là, avec de la chance, on trouve des bateliers pour passer sur la rive nord. Après 7 kilomètres de marche, on arrive près de chez Payeng. Les gens du coin appellent cet endroit Molai Kathoni (“le bois de Molai” – d’après le surnom de Payeng). Tout a commencé en 1979. Des crues avaient rejeté un grand nombre de serpents sur le banc de sable. Après le retrait des eaux, Payeng, qui n’avait que 16 ans, trouva le site couvert de reptiles morts. Ce fut le tournant de sa vie. “Les serpents étaient morts de chaleur, il n’y avait pas d’arbres pour les protéger. Je me suis assis et j’ai pleuré sur leurs corps sans vie. C’était un carnage. J’ai alerté le ministère des Forêts et leur ai demandé s’ils pouvaient planter des arbres. Ils m’ont répondu que rien ne pousserait ici et m’ont dit d’essayer de planter des bambous. C’était dur mais je l’ai fait. Il n’y avait personne pour m’aider”, raconte Payeng, qui a désormais 47 ans. Le jeune homme quitta ses études et son foyer, et se mit à vivre sur le banc de sable. Contrairement à Robinson Crusoé, il accepta volontiers cette vie d’isolement. Et non, il n’avait pas de Vendredi. Il arrosait les plants matin et soir et les taillait. Au bout de quelques années, le banc de sable est devenu un bois de bambou. “J’ai alors décidé de faire pousser de vrais arbres. J’en ai ramassé et je les ai plantés. J’ai aussi rapporté des fourmis rouges de mon village : les fourmis rouges changent les propriétés du sol. J’ai été piqué plusieurs fois”, raconte Payeng en riant. Bientôt, toute une série de fleurs et d’animaux s’épanouirent sur le banc de sable, y compris des animaux menacés, comme le rhinocéros à une corne et le tigre royal du Bengale. “Au bout de douze ans, on a vu des vautours. Les oiseaux migrateurs ont commencé à arriver en masse. Les daims et le bétail ont attiré les prédateurs”, déclare Payeng, qui s’exprime comme un écologiste chevronné. “La nature a créé une chaîne alimentaire : pourquoi est-ce qu’on ne s’y tient pas ? Qui protégera ces animaux si nous, les êtres supérieurs, nous nous mettons à les chasser ?”Le ministère des Forêts de l’Assam n’a entendu parler de la forêt de Payeng qu’en 2008, lorsqu’un troupeau d’une centaine d’éléphants sauvages s’y est réfugié après avoir ravagé les villages voisins. Ils ont aussi détruit la cabane de Payeng. C’est là que Gunin Saikia, conservateur assistant des forêts, a rencontré Payeng pour la première fois. “Nous avons été surpris de trouver une forêt aussi dense sur le banc de sable. Les gens du coin dont la maison avait été détruite par les pachydermes voulaient abattre ce bois, mais Payeng leur a dit qu’il faudrait le tuer d’abord. Il traite les arbres et les animaux comme si c’étaient ses enfants. Quand on a vu ça, on a décidé de contribuer au projet, raconte-t-il. Payeng est incroyable. Ça fait trente ans qu’il est là-dessus. Dans n’importe quel autre pays, il serait un héros.”