lundi 4 octobre 2010

vivre dignement

'écris parce que je suis atterrée par notre monde actuel dans lequel, pourtant, je suis pleinement actrice. C'est terrible d'en être conscient. Impossible d'en sortir avec une pirouette. Alors autant plonger, chacun avec les outils qu'il sait utiliser....mais j'ai peur des mots s'ils ne restent que tels.

Une façon de s'opposer à ce qu'on ne sent pas bon pour le monde est de continuer à être soi-même au plus près de sa cohérence profonde.
c'est un combat dans l'ombre.... quoique pas assez caché car on suscite des réactions de gens qu'on interpelle sans vraiment le vouloir, dans leur conscience ; cela leur est tellement insupportable parfois qu'ils sont obligés d'attaquer.... mais ils ne se rendent pas compte qu'ils se font du tort à eux-mêmes d'abord. Après, l'autre en face a la "liberté" de se laisser perturber, d'être affecté.... donc il s'agit de se fortifier intérieurement.
Mais cela suffit-il dans notre monde actuel où tous les coups sont permis, surtout ceux qui rapportent de l'argent et du pouvoir à une petite minorité, ou tout va trop vite, la réactivité à son comble ?
Il faut poser des actes.
j'en suis là.
Ce soir je doute .... le premier, pour moi, serait de ne travailler que pendant les heures imparties car si tout le monde le faisait peut-être serait-on peut-être obligé d'embaucher d'autres personnes?
.... même cela, je n'y arrive pas, parce que ma petite parcelle, mon champ de manoeuvre, j'en suis responsable et les gens attendent des réponses, que la procédure avance, des résultats, des autorisations....
que faire ?
nos réunions participent à ce travail dans l'ombre mais cela suffit-il ? le fossé se creuse entre ce que nous vivons à l'intérieur et la réalité quotidienne.
Cette violence.
Aurons-nous le temps de faire évoluer des consciences (chacun la sienne, ce sera déjà énorme) pour vraiment avoir un impact à l'extérieur ?
Pour moi, c'est tellement simple : avoir conscience que l'autre est comme soi-même : tellement semblable ; chacun veut vivre dans la dignité. Comment peut-on profiter de toutes les bonnes choses si l'autre n'a même pas le stricte minimum ?
En fermant les yeux.
Cela nous arrive à chacun, je le sais bien.
Même avec mes difficultés, j'ai encore beaucoup plus d'argent que certains.
Où est la limite ?
Il n'y en a pas.... il va falloir que nous partagions, que nous nous entraidions.
je crois bien que nous nous en sortirons ensemble ou pas du tout.
Mais en attendant, quelle souffrance. Que de bagarres. peine perdue.
Tout cela n'est que mots.
Heureusement que mon piano me traverse de ses vibrations d'accords, le ronronnement du chat m'apaise, son doux pelage me caresse autant que je le caresse, l'air pur de la campagne me lave de l'intérieur, l'opulence des arbres fruitiers me nourrit gratuitement
non,je ne peux décemment pas me plaindre.
Alors pourquoi cette dépression invisible sous mon sourire qui s'impose malgré tout ?
Ce qui me gêne est toute cette richesse qu'il nous est de plus en plus impossible de partager à force d'angoisser pour l'avenir.
Cette rigidité bureaucratique, ces lois soumises à la dictature de la rentabilité à tout prix, ce système auquel nous sommes soumis et qui ne reconnaît plus la place de chacun dans notre société qui s'emballe.
La responsabilité individuelle est tellement compartimentée, divisée à l'extrême que nous n'en avons plus conscience ; ainsi il est plus facile de se dire qu'on n'y peut rien ou alors tellement peu de choses ; puis on nous offre assez de "loisirs" pour museler, anesthésier la conscience ; la restriction de la liberté, chacun à son petit niveau, permet cet irrespect de l'autre à ne pas même lui permettre de vivre dignement.
Vivre dignement dans une cellule de prison : oui, cela est possible si on ne lui retire pas son statut d'homme, même s'il a agi pire qu'un animal. Si on lui permet de se rendre utile, de se nourrir correctement, de dormir en paix, d'avoir l'espoir d'être aimé un jour....
Vivre dignement dans un camp de Roms : oui, cela est possible si on pouvait s'intéresser à eux, à leur vie, leur histoire, leurs espoirs... au lieu de les stigmatiser depuis des décennies : peut-on reprocher à une personne de voler si elle ne peut gagner honnêtement sa vie ? ou si elle n'a pas appris à respecter autrui ? commençons, nous les sédentaires, à les reconnaître, à leur aménager des emplacements dignes ; chanter et danser avec eux peut-être ? alors, dans "longtemps" comme disent les enfants ils se sentiront enfin dignes et fiers.
Vivre dignement, et mourir dignement dans un hôpital. Cela veut dire se nourrir d'aliments simples et remplis d'énergie, pouvoir y accueillir les gens qu'on aiment, être écoutés, touchés, lavés, appelés par son nom jusqu'à la fin et même après.
Apprendre dignement dans une école qui laisse le temps à chacun d'assimiler à son rythme, qui applaudit autant au progrès qu'à l'effort sinon plus à l'effort, même si les résultats ne rentrent pas dans le cadre dicté par une poignée de bureaucrates pour qui ils ne sont que fanions à brandir, justificatifs de réformes qui se succèdent,
Travailler dignement à servir une société pour tous, qui soutient les faibles et les deshérités de la vie grâce à la satisfaction et au bonheur de ceux qui ont la chance d'être en bonne santé, physique ou mentale et qui ne demandent pas plus.
Tout cela n'est que mots. Comment les faire vivre ?

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