D'abord le fracas d'une grande explosion.
Puis le temps qui commence à s’égrener.
Le temps qui ne sait pas qu'il est le temps.
Et comme pour le réveiller, un battement:
sourd, régulier, lointain
et le silence qui le porte.
«-Vous entendez! C'est au loin!
Un battement, sourd, régulier...
Bien entendu vous n'entendez rien!»
C'est Oreille qui vient de parler, elle est
collée au sol et … écoute.
«-Je n'entends rien, mais je sens quelque
chose! Sous ma paume, ça tremble!
-Moi aussi! dit l'autre.»
Mains, au bout de leurs bras, plaquées
sur le sol, s'adressent aux autres.
«-Je ne sais pas ce que c'est, mais ça fait
un p'tit bout de temps que j'ai des fourmis
dans les pieds et dans les jambes aussi.
Faut qu'je bouge! Faut qu'je bouge!»
1
Les deux pieds trépignent
au bout de leurs jambes
et font des sauts de cabris, comme s'ils
avaient des braises sous la plante.
«-J'ai beau garder et regarder, je ne vois
rien, mais rien de rien! Une oreille qui
entend, des mains qui sentent,
des pieds qui ont la bougeotte!
T'en penses quoi la Bouche?
Oeil vient de parler.
-Ce que j'en pense, c'est que tout ça
ce ne sont que des mots. Au lieu de rester
là plantés à ne rien faire, on pourrait
peut-être se bouger un peu. comme
disent les pieds et aller voir de plus près.»
Mais pour bouger, il faut un élan,
une force qui mette en marche,
une volonté,
une impulsion.
Pour une fois, Cortex et Reptilien,
vous ne pourriez-pas vous mettre d'accord
qu'on aille voir un peu ce que c'est
que ce bruit qui nous intrigue! »
Torse vient de s'adresser aux deux masses
pensantes du corps éparpillé.
« -Si ça se trouve c'est pour nous attirer dans
un piège! C'est pour nous faire du mal!
Nous manger peut-être!
On devrait y réfléchir à deux fois
avant de se mettre en route, on risque gros!
-Tu penses trop Cortex,
allez zou, on y va!»
ainsi parla Reptilien.
Oreilles, bouche, yeux, mains, bras, jambes,
pieds, torse, cortex et reptilien
se mettent en route vers ce bruit attirant,
lancinant,
Irrésistible comme une tablette à 90% de
cacao devant les yeux d'un addict au chocolat!
«-J'la sens pas trop votre histoire!
Je ne vais pas rester tout seul,
comme le nez que je suis au milieu d'un
visage! Je vous suis.
3
-C'est long, c'est loin,
je commence à avoir des ampoules!
-C'est pas grave, tu pourras toujours nous
éclairer quand il fera noir.
-C'est bien de l'humour de Cortex ça!
Toujours à faire un bon mot.
T'es pas obligée de tout répéter, bouche!
-Je sais mais qu'est-ce que tu veux,
un jour ça me perdra de dire tout haut
ce que Cortex pense tout bas.
-Chut! Écoutez ça se rapproche!
Oeil, tu ne vois rien?
-Rien, toujours rien!
-Je sens qu'on est sur la bonne piste!
-Je me méfie avec toi, Nez,
car des fois tu te trompes!
-Arrêtez de causer! Allez, zou! Tout droit!»
Ainsi parla de nouveau Reptilien.
C'est régulièrement le cas:
il a souvent le dernier mot.
4
«-Mais qu'est-ce-qui vous prend
jambes et pieds?
-C'est plus fort que nous!
Il ne faut pas perdre de temps,
ne sentez-vous pas que le bruit se ralentit!
-Je vois une sorte de grotte !
-Vite! Plus vite, jambes et pieds ont raison,
c'est de moins en moins régulier.
-Courir un peu comme si
on avait le feu à nos trousses?
-Pour une fois t'as raison, Cortex, alors cours!»
Ils sont arrivés dans la grotte d'où venait le bruit.
Et là, un Cœur fragile qui palpite,
qui appelle, qui cherche une maison.
Un toit pour accueillir ses espoirs,
ses illusions, ses amours et ses déceptions.
«- Main qu'est-ce -que tu attends! Prends-le!
-J'ai peur de lui faire mal!
Et s'il ne m'aimait pas!
-Tu nous embêtes Cortex,
Reptilien fais quelque-chose!»
5
Alors, sans réfléchir
main s'est saisie du cœur
et l'a déposé au fond de nous-mêmes.
Il en est ainsi depuis le début du temps,
qui sait maintenant, qu'il est le temps.
Ce cœur qui nous habite et que l'on abrite.
Cette humanité
qui fait de nous des humains.
Puisse-t-elle vivre en nous, tout le temps.
Et qu'au travers de notre cœur
et de notre esprit,
de notre corps tout entier,
continuent à vivre tous ceux qui sont,
et tous ceux qui ne sont plus.
Bonne année 2015.
Bouche a parlé,
Oreilles ont écouté
et mon conte est terminé!
Patrick et Marithé SAULNIER de NABRINGHEN
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