mercredi 14 août 2013

partage de vécu en Afrique n° 3 (par Gautier)

Un voisin que j’ai rencontré au maquis du coin n’ a plus de travail en ce moment. Il a mon âge, une
petite fille et travaille dans le domaine de la soudure et de la menuiserie. Il était convoyeur pendant
un temps mais a dû arrêter de travailler, pour la simple raison que son véhicule était en panne. Une
panne qui pourrait être r éparée avec 200 euros, mais ici il n’y a pas d’ économies. Il est motivé,
envoie des lettres partout (notamment dans les mines du nord du pays, gérées par les canadiens),
mais n’écrit pas bien. Je l’ ai alors aidé à rédiger une lettre au ministère du travail afin de demander
des fonds pour pouvoir démarrer une activité. C’ est à ces moments-là que l’ on se rend compte que
dans un monde ouvert, où la concurrence entre les individus est globale, du moins concernant
certains domaines, il est impossible qu’ils comblent leur retard. Ils ne savent pas écrire correctement,
ni ne prennent en compte l’ensemble des enjeux liés à un problème donné. Je dis « ils », je
généralise, mais quand je vais au ministère, je tombe des nues. La plupart des « hauts »
fonctionnaires tr ainent sur Facebook ou jouent au démineur, et écrivent des papiers qui soit n’ont
pas de sens, soit sont bourrés de fautes, souvent les deux. Et on est à chaque fois réquisitionné pour
les aider à corriger. Aider quelqu’un directement (comme mon voisin) redonne un peu d’ espoir dans
un environnement où tout semble englué. Mais quand il me dit 4 fois en dix minutes qu’il va prier
pour nous, que si Dieu le veut, le ministre en personne lira sa lettre et lui donnera les 3 000 000 de
FCFA, l’euphorie retombe. Je lui explique alors les possibilités qu’il a pour que sa demande ait le
plus de chances d’ êtr e traitée (et qui n’ ont rien à voir avec Dieu), il les trouve formidable : lettre
recommandée, mail, aller  sur place, y r etourner si besoin, et tous les jours. Il me salue en me disant
qu’ il va continuer à prier pour sa demande et pour ma santé. Et dans ma tête je me dis froidement
que vu les conditions de vie de sa famille, la gueule de son quartier et l’ état de ses finances, il
faudrait peut-être changer de tactique. Qu’aller à la mosquée en construction (depuis dix ans) cinq
fois par jour, ça ne marche peut-être pas si bien que ça. Je ne comprends pas comment un individu....

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